5.5. Des trajectoires et stratégies contrastées de sortie de la pauvreté dans les pays en développement
Les stratégies de développement par la promotion et la substitution des exportations : Asie de l'est et du sud-est
A partir du constat que les stratégies de repli, de protection, ont manifestement accru la dépendance extérieure des PED et favorisé la corruption interne des milieux politico-économiques, les pays industrialisés et les organisations multilatérales (Fonds Monétaire International et Banque Mondiale) préconiseront l’adoption de stratégies de mise en place des marchés internes concurrentiels et d’ouverture internationale pour lutter contre la pauvreté et stimuler la croissance des pays en développement.
Les succès d’industrialisation tardive de certains pays asiatiques (Japon, Corée du sud, Taiwan) montrent la voie d’une stratégie possible d’industrialisation par des incitations fortes à exporter et la construction d’avantages comparatifs nouveaux par le biais de politiques industrielle et commerciale très volontaristes. La stratégie d’industrialisation de substitution des exportations va consister, elle, à promouvoir les exportations manufacturières en remplacement des exportations de produits primaires fussent-ils non agricoles, ou bien encore, à promouvoir les exportations manufacturières intenses en capital technique en remplacement de celles intenses en main-d’œuvre (la Corée du Sud en est l’exemple le plus abouti).
Grâce à cette stratégie, les Dragons et Tigres asiatiques assurèrent jusqu’à la fin des années 1990 près de 80% des exportations totales du Tiers-Monde, avant que la Chine ne soit totalement éveillée. La banque mondiale publiera en 1993 un volume très connu sur cette réussite asiatique dans laquelle elle reconnaîtra rétrospectivement l’importance du rôle de l’Etat dans la réussite de cette stratégie.
L’analyse historique de ces succès d’industrialisation tardive montre qu’un certain nombre de conditions étaient présentes dans les réussites identifiées:- une base industrielle compétitive doit préexister, ce qui était le cas en Corée du Sud, à Singapour ou au Brésil, par exemple, après une période d’ISI ;
- un engagement et une collaboration de toutes les parties prenantes (administration, entreprises, salariés) derrière le projet d’industrialisation par croissance de la compétitivité industrielle ;
- l’aide extérieure via les investissements des FMN des pays industriels doit être acceptée, notamment en jouant, dans un premier temps, le rôle de pays-atelier (d’assemblage) d’où partent les exportations de produits finis, donc en maintenant une pression sur les revenus salariaux et les revendications de la population ouvrière notamment féminine, ;
- une position géographique favorable est préférable, passage obligé entre les zones d’échanges les plus actives de la planète, comme Singapour à partir des années 1980, ou le Vietnam ou le Maroc aujourd’hui.
Réunir
toutes ces conditions simultanément est très compliqué, ce qui explique que peu
de pays en développement aient pu suivre cette voix avec succès jusqu’à
aujourd’hui.