3. Les travaux empiriques
La macroéconomie ne se limite pas à des travaux théoriques et à la modélisation. Il existe aussi un important travail empirique effectué par les macroéconomistes mobilisant des observations du « monde réel » et des statistiques.
Encore une fois, la macroéconomie est « née » avec la crise de 1929. C’est en partie au travers de l’observation de cette crise, de ses conséquences et des politiques mises en œuvre pour la contrer (on peut penser au New Deal mis en place par Roosevelt après 1933) que Keynes a développé sa Théorie Générale. L’observation d’études de cas joue donc un rôle crucial en macroéconomie. C’est généralement suite à l’observation d’un phénomène encore mal compris, que les macroéconomistes vont formuler de nouvelles théories, affiner les théories existantes ou abandonner des théories jugées peu satisfaisantes.
Toutefois, même de « simples » observations exigent généralement un important travail en amont. Supposons par exemple qu’un économiste remarque que l’activité économique est plus soutenue en Allemagne qu’en France et qu’il postule que cela résulte d’un plus grand investissement des entreprises Allemandes par rapport aux entreprises Françaises. Par ailleurs, ce même économiste suggère que cela induit une différence de taux de chômage entre les deux pays, le taux étant plus faible en Allemagne.Pour pouvoir faire cette constatation, notre économiste doit disposer d’une mesure (et d'une définition) de l’activité économique dans les deux pays. Ces mesures doivent par ailleurs être suffisamment semblables pour autoriser des comparaisons. De la même manière, notre économiste a besoin de pouvoir mesurer le niveau de l’investissement des entreprises dans les deux pays ainsi que leurs taux de chômage respectifs. Là encore, il faut que de telles mesures existent et que ces mesures soient suffisamment similaires pour être comparables.
Cette nécessité de « mesurer » des grandeurs économiques et si possible de les mesurer de telle sorte que des comparaisons entre pays, entre régions, etc. soient possibles a conduit à la mise en place de Systèmes de Comptabilité Nationale. La comptabilité nationale est donc un ensemble d’outils qui va définir des grandeurs économiques (PIB, consommation, investissement, etc.), étudier les relations entre ces grandeurs et surtout, chercher à les mesurer dans des économies réelles. Certaines des grandeurs définies par la comptabilité nationale jouent un rôle central en (macro)économie et plus généralement, dans les débats économiques (le PIB, le taux de croissance, la consommation des ménages, la dette, etc.), aussi est-il nécessaire de s’y intéresser plus longuement. Cela sera fait dans le chapitre 2 de ce cours où nous reviendrons en détail sur la notion de PIB
La partie empirique de la
macroéconomie ne se limite pas à ces questions de mesure. On peut également
chercher à anticiper l’évolution de
l’économie à plus ou moins brève échéance. On peut également chercher à mesurer l’effet de politiques publiques
mises en place. Ces deux questions jouent un rôle central dans le débat public.
Lorsqu’un gouvernement définit son budget pour l’année suivante, il doit
anticiper le montant des taxes et des impôts collectés. Ceux-ci dépendent de la
consommation future, du niveau du chômage et de l’emploi dans un an, etc. cela
exige donc d’avoir une idée de l’activité économique dans un an. De même,
lorsqu’un Etat met en place une politique pour dynamiser la croissance (une
réduction d’impôt, une hausse des dépenses publiques, etc.) cela a un coût pour
l’Etat et peut-être, à terme, pour le contribuable. Il est également important de
pouvoir mesurer l’impact des politiques passées afin d’en faire le bilan.
Ces questions sont maintenant au
cœur de la recherche en macroéconomie comme en témoigne le « prix
Nobel » accordé en 2011 aux chercheurs américains Thomas Sargent et
Christopher Sims « pour leur recherche empirique sur la cause et l'effet
en macroéconomie » (selon le comité en charge de ce prix Nobel).
Toutefois, ces dernières questions sont complexes et nécessitent une expertise
à la fois en macroéconomie et en statistique/économétrie. C’est pourquoi, à de
rares exceptions près, elles ne sont abordées que tardivement dans les cursus
de macroéconomie. Dans ce cours, nous ne nous en préoccuperons pas.